21 février 2025
10 décembre 2015
Saisi en appel par le ministre de l’Intérieur et la commune de Calais, le Conseil d’État confirme en tous ses points la décision rendue quelques semaines plutôt par le juge des référés du tribunal administratif de Lille et les injonctions destinées à améliorer les conditions d’existence des migrants présents dans la Lande.
A l’origine de l’affaire
Depuis plus de quinze ans et la fermeture de Sangatte, la situation des migrants venus à Calais dans l’espoir de rejoindre l’Angleterre n’a cessé de s’aggraver. En octobre 2015, 6 000 personnes dont 300 femmes et 50 enfants, étaient installées dans des tentes et des abris de fortune. L’état d’extrême dénuement de ces personnes et leurs conditions de vie insalubres ont été dénoncés à maintes reprises par les associations et par de récents rapports, notamment du Défenseur des Droits.
Face à l’urgence, plusieurs migrants et associations ont saisi le juge dans le cadre d’une requête en référé liberté pour contraindre l’Etat et la commune de Calais à prendre les mesures d’urgence nécessaires à la préservation des droits fondamentaux des migrants.
Ils invoquaient, en particulier, des atteintes au droit à la dignité humaine, au droit à l’hébergement d’urgence, au droit de ne pas subir de traitements inhumains ou dégradants ainsi qu’au droit d’asile. Par une ordonnance du 2 novembre 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à une partie de leurs demandes et a prononcé plusieurs injonctions à l’encontre de l’Etat et de la commune de Calais portant notamment sur les conditions d’insalubrité du bidonville.
Le ministre et la commune de Calais ont fait appel de cette décision, estimant que leur carence n’est pas établie et que les injonctions prononcées à leur encontre ne relèvent pas de leur compétence.
Des conditions de vie exposant les migrants à des traitements inhumains ou dégradants
Le Conseil d’État confirme la décision rendue en première instance. Après avoir constaté « qu’il n’est pas sérieusement contesté que […] les conditions actuelles d’hébergement, d’alimentation, d’accès à l’eau, d’assainissement et de sécurité de la population vivant sur le site de la Lande […] révèlent une situation d’urgence caractérisée », il retient des atteintes graves et manifestement illégales aux libertés fondamentales.
S’il considère qu’il n’y a pas de carence de l’Etat dans la mise en œuvre du droit à l’hébergement d’urgence, ce dernier ayant mis en place des mesures récentes, il confirme cependant l’injonction prononcée en première instance concernant la situation des mineurs isolés étrangers. L’État doit procéder dans un délai de 48h à leur recensement et se rapprocher du département du Pas-de-Calais en vue de leur prise en charge.
Pour répondre aux conclusions du ministre et de la commune de Calais, le Conseil d’État rappelle qu’en l’absence de texte particulier, ces autorités sont dans le cadre du pouvoir de police générale qui leur est conféré « garantes du respect du principe constitutionnel de sauvegarde de la dignité humaine ». Le Conseil d’État confirme là encore la décision du juge des référés de première instance qui ordonne à la commune de Calais et à l’État, dans un délai de huit jours et sous astreintes de 100 euros par jour de retard :
Comme le juge des référés de première instance, le Conseil d’État rejette toutefois les moyens soulevés par les migrants et les associations concernant l’insuffisance du nombre de repas distribués (2 500 par jour) estimant que « de nombreux migrants pourvoient à leurs propres besoins alimentaires soit grâce aux associations présentes sur le site, soit par leurs propres moyens, et qu’il n’est pas établi que les migrants souffriraient de malnutrition », et les atteintes alléguées au droit d’asile.
Il estime également que certaines demandes ne relèvent pas de la compétence du juge saisi dans le cadre d’un référé liberté, notamment celle tendant à enjoindre le maire à réaliser un inventaire des ressources foncières pour identifier les bâtiments inoccupés.
21 février 2025
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