22 novembre 2024
31 janvier 2022
La réforme de l’évaluation des établissements sociaux et médico-sociaux devait entrer en vigueur au 1er janvier 2022, après avoir été repoussée une première fois au 1er novembre 2021. Néanmoins, sa mise en œuvre impliquait un certain nombre d’ajustements législatifs qui figuraient dans un amendement déposé par le gouvernement sur le Projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2022. Or cet amendement a été censuré le 16 décembre 2021 par le Conseil constitutionnel, qui l’a considéré comme un « cavalier » législatif (autrement dit, sans objet avec le PLFSS). La réforme est désormais suspendue et le manque de visibilité sur son calendrier de mise en œuvre est problématique à bien des égards.
Une suspension de la réforme qui entraîne un vide juridique
L’article censuré par le Conseil constitutionnel contenait des dispositions nécessaires au déploiement du nouveau dispositif (et notamment l’accréditation des organismes en charge de réaliser les évaluations externes), mais également des éléments de sécurisation juridique. Il devait notamment prolonger les autorisations des ESSMS n’ayant pas pu réaliser leurs évaluations en 2020 et 2021, ainsi qu’en 2022 du fait de la période transitoire, jusqu’en 2025.
Faute d’entrée en vigueur du nouveau dispositif, les établissements sur le terrain sont confrontés à un vide juridique insécurisant et à des injonctions contradictoires des autorités de tarification et de contrôle, en l’absence de directives partagées à l’échelle nationale. Pour les établissements du secteur AHI, certaines DDETS reviennent à la procédure antérieure des évaluations externes et internes, avec parfois des demandes de transmission de résultats pressantes. D’autres DDETS temporisent en attendant d’avoir plus de visibilité sur le calendrier de de la réforme.
Dans tous les cas, les dispositions du décret du 12 novembre 2021 relatif au rythme des évaluations restent pour l’instant inchangées : le décret fixe notamment une période transitoire de transmission des résultats sur la base du nouveau référentiel, entre le 1erdécembre 2022 et le 30 juin 2023, pour les ESSMS dont l’autorisation a été délivrée entre le 1erjanvier 2007 et le 31 décembre 2008 qui n’ont pas transmis au 1er janvier 2022 les résultats de leur 2e évaluation externe. Des premières programmations pluriannuelles devraient par ailleurs normalement être arrêtées au plus tard le 1er juillet 2022 par les autorités compétentes, pour la période allant du 1er juillet 2023 au 31 décembre 2027, la transmission des résultats des évaluations se faisant désormais sur un rythme quinquennal.
Face à ce constat d’un flou persistant et en l’absence d’une publication du référentiel, plusieurs têtes de réseau dont la FAS ont signé un courrier commun pour interpeller les six ministres et secrétaires d’Etat concernés sur les conséquences de l’annulation par le Conseil constitutionnel des dispositions du PLFSS concernant l’évaluation des ESSMS. Le courrier demande notamment à ce que des consignes claires soient données aux différentes autorités de tarification et de contrôle, dans l’attente d’une entrée en vigueur de la réforme. Pour cela, le gouvernement doit pouvoir identifier un nouveau vecteur législatif, ce qui n’est pas sans difficultés au vu de l’échéance prochaine des élections présidentielles.
Des inquiétudes concernant le nouveau référentiel d’évaluation
Le nouveau référentiel d’évaluation, commun à tous les ESSMS tous secteurs confondus, devait être publié en janvier 2022. En l’absence d’une validation formelle suite à l’intervention du Conseil constitutionnel, le référentiel n’est pour l’instant toujours pas public, ce qui rend difficile la concertation avec les adhérents de la Fédération.
Le référentiel et les documents qui l’accompagnent (manuel d’utilisation, procédure d’évaluation) ont été présentés par la Haute Autorité de Santé le 14 décembre 2021 au sein d’un comité de concertation qui rassemble les différentes têtes de réseau associatives. Pour rappel, ces dernières n’ont pas pu être associées directement à l’élaboration du référentiel, du fait de règles de la HAS relatives aux conflits d’intérêt. La FAS a donc participé à une consultation publique en janvier-février 2021, et depuis, n’avait pas été consultée sur l’élaboration du document.
Comme il était à craindre, ce référentiel unique s’avère problématique à plusieurs titre :
Une première analyse du référentiel et des points de vigilance identifiés par la FAS est disponible en en ligne, elle a été transmise à la Haute Autorité de Santé. La FAS a également sollicité la DIHAL, qui est à l’écoute des problématiques que peut poser le référentiel aux établissements du secteur AHI et se mobilise sur le sujet. L’objectif visé par la FAS est d’obtenir plus de latitude, pour que le référentiel puisse être retravaillé en concertation avec les têtes de réseau concernées, ou que ses critères puissent a minima être adaptés, afin de mieux tenir compte de la spécificité des établissements de l’AHI et du DNA.
Quelle compensation du coût des évaluations ?
Dans l’article du PLFSS annulé par le Conseil constitutionnel figurait également une mention relative à la compensation par la CNSA, pour les ESSMS relevant de son périmètre, des surcoûts générés par la réalisation des évaluations -sans que ne soient détaillées les modalités concrètes de cette compensation financière. Néanmoins, rien n’était prévu pour les établissements du secteur AHI, du DNA ou ceux qui relèvent de l’ONDAM spécifique ou encore de la protection de l’enfance, ce qui induisait une inégalité de traitement entre secteurs.
La FAS considère que le gouvernement doit aujourd’hui s’assurer de la compensation de ces coûts pour l’ensemble des ESSMS, quelles que soient leurs modalités de financement, pour que tous bénéficient d’un soutien équitable dans le cadre du nouveau dispositif d’évaluation, alors même que les coûts des évaluations risquent d’augmenter avec les exigences accrues induites par la réforme et la mise en place de l’accréditation des organismes évaluateurs
Si les coûts des évaluations ne sont pas pris en charge pour les établissements des secteurs mentionnés, ces derniers seront alors dans l’obligation d’assumer ces frais supplémentaires, au détriment d’autres postes de dépenses. In fine, c’est l’amélioration de la qualité de service visée par la réforme de l’évaluation qui pourrait être remise en question, les surcoûts risquant d’induire de manière indirecte une dégradation des prestations proposées aux personnes accueillies.
Lancement d’un groupe de travail national sur l’évaluation
Au vu des actualités récentes sur la réforme de l’évaluation, et malgré le report de l’entrée en vigueur du nouveau dispositif, la FAS a décidé de mettre en place un groupe national sur l’évaluation, afin d’avoir un espace d’échange avec une diversité d’adhérents (origine géographique, type et taille d’établissements), dans l’objectif de produire des décryptages et de l’outillage à destination de l’ensemble du réseau.
Pour toute question relative à la réforme de l’évaluation, vous pouvez contacter la chargée de mission référente Tiphaine Vanlemmens : tiphaine.vanlemmens@federationsolidarite.org